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Franz Kafka, La Métamorphose, Paris, Gallimard, 2000
première édition 1915
La grave blessure de Gregor, dont il souffrit pendant plus d'un mois - la pomme, que
personne n'avait osé retirer, restait fichée dans sa chair, comme un souvenir visible - ,
semblait avoir rappelé à son père lui-même que Gregor, malgré son triste et répugnant
aspect, n'en demeurait pas mois un membre de la famille, qu'on ne pouvait pas traiter en
ennemi ; le devoir familial exigeait de ravaler sa répulsion et de le supporter ; il suffisait
qu'on le supporte. [...]
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Boris Vian, Manuel de Saint-Germain-des-Prés, Paris, Pauvert, 1997
Première édition au Chêne, 1974
Alberto Giacometti
Encore un des visiteurs spécialement valables de Saint-Germain-des-Prés, où tout le monde
connaît sa chevelure touffue, son visage de cire un peu raviné, son allure vaguement hallucinée.
Un grand sculpteur au talent inquiet. N'est jamais content de ce qu'il fait et se détruit assez
volontiers dans son désir de perfection. Sous une reproduction d'un album des Cahiers d'Art
consacré à Max Ernst il y a une légende : Le jardin d'Alberto Giacometti à Maloja après le
passage de Max Ernst, doué d'un pouvoir obsessionnel. A l'arrière-plan, il y a la porte de la
maison; on ne sait pourquoi, c'est une image qu'on retient. Ce n'est pas seulement à cause
du passage d'Ernst, c'est parce que Giacometti, caché derrière la porte, était sûrement en train
de faire des envoûtements avec des petites statues hautes comme des aiguilles.
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Une partie des archives de René Char destinée à la Bibliothèque Doucet oubliée par les conservateurs.
Lu dans Libération, jeudi 20 décembre 2007
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Henri Calet, Rêver la Suisse, Paris, Pierre Horay, 1984
Première édition chez Flore en 1948
Au cours de l'été de 1946, l'envie me prit d'aller en Suisse. Il semble que j'évoque un temps
très lointain. La guerre venait de finir; on espérait que la paix suivrait, comme d'habitude. Les
femmes portaient uniformément des jupes courtes. On parlait encore de la "Résistance". A cette
époque, tout nous parassait simple. Les restrictions alimentaires seraient progressivement levées,
pensions-nous. On se dirigeait vers le bien-être, la sécurité, la démocratie, sous les ailes de l'onu.
Oui, tout était clair alors. Tandis qu'aujourd'hui...
Mais retournons plutôt à l'année 1946. Ce n'était pas un désir irrépressible ni aucune prédilection
qui me poussait vers la Suisse, mais presque une foucade. Je me sentais assez attiré par ce petit
pays, toujours neutre et toujours prospère, par les montagnes et les lacs qui s'y trouvent, un peu
aussi par les tissus de pure laine que l'on voyait, disait-on, aux étalages, et par le chocolat
Gala Peter dont je gardais comme une nostalgie. Un pays sans marché noir ou les produits se
vendaient en centimes. J'avais également quelque curiosité pour les innombrables distributeurs
automatiques, décrits par Jean Paulhan avec un certain enthousiasme. Et puis l'air de la Suisse
est très pur. [...]
L'allusion à Jean Paulhan renvoi à son Guide du voyage en Suisse qu'il publia quelques années auparavant.
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